Le tasbih ou le chant de transcendance de l’univers
Je lie le livre. Je lis le monde. Et voilà que la révélation que je médite, appose ses rimes sur les rythmes de la création que j’étudie.
Le monde a un sens. L’univers a un ordre. Le cosmos entier est en osmose. Il adhère, il adore, il obéit. Des lois, dès les débuts de son existence, le soumette, comme à la vérité qui apaise. C’est ce qui relie ses parties. Il est en harmonie. Et le principe, le fondement, le sens de cette symphonie est la transcendance divine qui l’ordonne. Il est en état d’Islam.
« C’est pour lui que tout ce qui est, dans les cieux comme sur terre, est en état d’Islam, de soumission, d’abandon, de paix ».[1]
« Pour lui, les sept cieux, la terre, tout l’univers, chante sa gloire, sa transcendance, sa perfection (tasbih). Et rien n’existe qui ne célèbre sa gloire mais vous ne comprenez pas leur chant… ».[2]
« L’ensemble de l’univers, dans les cieux, dans la terre, pour Dieu, chante sa transcendance. Il est le Tout puissant. Le plein de sagesse ».[3]
Ce « tasbih », que nous-avons traduit par « chant de transcendance », est le mouvement même de l’univers. Et ce mouvement infiniment bien réglé et beau, est l’expression de son adoration envers le divin. Le terme en sa signification l’indique. Sa transposition dans la réalité le montre : « nager », « voguer », « se mouvoir dans le moins dense » est le sens du verbe « sabaha ». Il désigne dans le Coran la course du soleil, de la lune et des astres dans leurs orbites respectives. Et c’est sa forme renforcée, « sabbaha », qui renvoie à l’idée de glorification, de pureté de Dieu de toute imperfection, de transcendance et de dépassement. Or ce « tasbih », qui célèbre la gloire du créateur par tout ce qui existe, s’incarne dans l’existence et le fonctionnement même de chaque élément de la création et dans l’ensemble de celle-ci qui évolue et se dépasse.
« Tout vogue sur son orbite »[4] ; « tout glorifie Dieu »[5] nous dit la révélation. L’un montre l’ordre ; l’autre nous dit le sens. Et les deux (mouvement et glorification du tasbih) nous révèlent l’Islam du cosmos, qui embrasse et embrase tout ce qui existe, et en fait un royaume en état d’obéissance et d’admiration pour son créateur.
Ne vois-tu pas comme cela « nage » ? N’observes-tu pas comment cela se meut ? Ne contemples-tu pas cette valse continuelle ? Ne vois-tu pas ce qui caractérise tout ce qui existe : le mouvement, le lien, l’harmonie et le dépassement. C’est l’adoration qui comprend, unit et transcende. L’adoration est recréation ; c’est une récréation. Celle de l’univers en expansion, du cosmos en interconnexion, de l’entrelacement de l’espace et du temps.
La symphonie se poursuit. Les signes du Livre se font cosmiques. Tout se relie dans le chant de transcendance :
« Que la gloire (transcendance, tasbih) soit à Dieu au moment de votre soirée comme au moment de votre matinée. À lui la louange dans les cieux, la terre, dans tout l’univers. Et la nuit et quand vient le zénith. Il sort le vivant du mort ; il sort le mort du vivant. Il ressuscite la terre après sa mort et c’est ainsi que vous sortirez.
Un de ses signes, une de ses merveilles, est qu’il vous a créé de la terre, puis vous voici là humains, vous propageant.
Et parmi ses signes, ce miracle : il a créé pour vous des épouses, des époux afin que vous trouviez la sérénité à leurs côtés. Et il a mis entre vous de l’amour et de la tendresse. Il y a là un signe pour les gens qui réfléchissent.
Un autre de ses signes : la création de cieux, de la terre, de l’univers et la diversité de vos langues et de vos couleurs. C’est là un signe, une interpellation pour les sachants ».
Si la création est un Livre, le Coran en est la ponctuation. Le livre parle. Il lit l’univers. Et le tasbih cosmique est par lui toujours lié à la relation entre la vie et la mort, entre mâle et femelle, dont les interactions fondent l’infini création, sa diversité et sa créativité qui aboutit, comme nous le verrons plus loin, à la servitude amicale (taskhir) de la nature pour l’être humain.
1- Transcendance (dépassement) et unité
2- Relation duelle des contraires mort/vie
3- Interaction duo des complémentaires mâle-femelle
4- Profusion créative « diversitaire »
L’univers n’est-il pas le jeu d’équilibre et de relation entre l’entropie et la néguentropie qui la dépasse, le chaos et le cosmos qui le comprend ? Le cosmos n’est-il pas dans son évolution et sa révolution, le fruit de l’interaction copulative et amoureuse, entre l’élément mâle et femelle, à tous les niveaux de la réalité cosmique ? Cette voie, ce sens du cosmos, ce tasbih universel est une célébration, une démonstration, un chant de transcendance qui fonde et accompagne la création, sa recréation et sa créativité, de la mort à la vie, de la vie à la mort, entre mâle et femelle, homme et femme, dans la profusion diverse et infinie des choses qui viennent à l’existence. Le tasbih comprend et contient ces relations que crée l’unité pour l’Un, entre les contraires et les complémentaires qu’il lie, distingue et relie, dans le mouvement incessant de sa création.
Unité. Dualité. Diversité ; Relation. Dépassement. Création : la fresque qui s’offre dans le révélé et dans le créé, reliés, nous donne le spectacle d’une harmonie, d’une symphonie qui se répète dans un acte divin, dans chaque acte du créateur, à la fois singulier et ressemblant, de l’infiniment petit à l’infiniment grand, dans l’atomique, le minéral, le cellulaire, le végétal, l’animal, l’humain et le galactique, qui dansent, se meuvent, se relient et se dépassent dans l’ordre cosmique qui les englobe, expression de l’adoration, de la prosternation de toute chose pour la Majesté absolue.
Partout la même tradition, la même profusion, la même signature. Tout devient signe, dans le mariage de l’ordre créé et du sens révélé, pour celui qui sait « lyre » le monde.
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